Le Cœur Non-Marchand de la Permaculture : Une Richesse au-delà du Financier
- Charles Judes
- 9 sept.
- 4 min de lecture
Charles Judes, septembre 2025

La permaculture est souvent perçue à travers le prisme de ses techniques : le design de jardin-forêt, la création de buttes, la gestion de l'eau. Pourtant, son véritable socle n'est pas technique, mais éthique. C'est son intention la plus pure, sa vocation non-marchande, qui la rend si puissante et si subversive.
La permaculture ne cherche pas à vendre la vie, mais à la cultiver.
Son but premier n'est pas le profit, mais la régénération.
Elle vise à prendre soin de la Terre et des personnes, à générer une abondance qui bénéficie à l'écosystème entier.
C'est un mouvement qui s'ancre dans le principe du don, le fondement même du capital vivant et du capital social.
Du "Non-Marchand" à la Richesse Multidimensionnelle
Cette vocation non-marchande est, de mon point de vue, l'essence même de la permaculture. Ce n'est pas un choix par défaut, mais une orientation fondamentale qui nous force à ne pas réduire la valeur d'un écosystème à son seul potentiel de vente.
La comptabilité traditionnelle, avec ses bilans et ses comptes de résultat, est un miroir qui ne reflète qu'une seule dimension de la richesse : le capital financier. C'est un reflet monochrome dans un monde en couleurs.
Un projet de permaculture, en revanche, génère de la valeur dans de multiples dimensions, qui restent souvent invisibles :
Vivant : la régénération des sols, l'augmentation de la biodiversité, la purification de l'eau.
Social : la coopération, le renforcement de la résilience collective et des liens communautaires.
Expérientiel : le savoir-faire et le savoir-être transmis, l'apprentissage continu par l'action.
Culturel : la transmission des récits et des traditions, l'ancrage dans un territoire.
Spirituel : la quête de sens, la reconnexion profonde avec le vivant.
La permaculture n'est pas "non-marchande" par accident, mais par essence. Elle est une source de richesse multidimensionnelle qui ne se résume pas à un prix.
La Permacomptabilité : Rendre l'Invisible Intelligible
Alors, comment naviguer dans un monde qui ne reconnaît que le marché ? Comment permettre aux projets de permaculture de subsister et de s'épanouir sans trahir leur vocation première ? C'est là que la Permacomptabilité entre en jeu.
Mon rôle de Permacomptable n'est pas de nier l'essence non-marchande de la permaculture, mais de la révéler. Il s'agit de rendre cette richesse invisible intelligible. L'enjeu n'est pas de faire de la permaculture une marchandise, mais de traduire sa valeur dans un langage que notre société peut comprendre.
Dans cette logique, l'argent n'est jamais la finalité. C'est un simple outil, un agent de circulation qui permet à la richesse (sous toutes ses formes) de circuler et d'irriguer le système. Il facilite l'échange, le partage et l'épanouissement, sans devenir l'objectif ultime.
La Permacomptabilité nous aide à honorer le cœur non-marchand de la permaculture tout en aidant les projets à trouver leur voie vers la résilience économique. C'est un pont entre le monde du vivant et le monde de l'économie, un moyen de montrer que prendre soin de la Terre et des personnes est la stratégie la plus viable et la plus riche qui soit.
La Permaculture est par essence non marchande, mais par nature génératrice de richesses multiples.
Le Retour sur Investissement Global : Quand la Richesse se Mesure en Vitalité et en Liens
Dans notre économie, la question du Retour sur Investissement (ROI) est sacrée. On ne jure que par les chiffres, les marges et les profits. Mais que se passerait-il si l'on élargissait notre calcul ? Si l'on osait mesurer le succès non pas uniquement en euros, mais aussi en richesse des sols, en force des liens sociaux et en épanouissement personnel ?
C'est la promesse d'une nouvelle approche, un Retour sur Investissement Global qui va bien au-delà du financier.
ROI Écologique (Capital Vivant)
L'investissement : Le temps, l'énergie et les ressources que vous dédiez à la régénération des sols, à la plantation d'arbres et à la diversité des cultures. Cet effort n'est pas une dépense, mais la création d'un capital vivant.
Le retour : La résilience et la fertilité du système. Un sol riche et vivant retient mieux l'eau, réduisant vos besoins en irrigation. Un écosystème diversifié accueille une biodiversité d'auxiliaires qui régule naturellement les nuisibles. Vos rendements, mesurés en vitalité et en autonomie du système, augmentent sur le long terme tout en diminuant les intrants externes. Vous passez d'une logique de production linéaire à une boucle de régénération.
ROI Social & Culturel (Capital Social)
L'investissement : L'organisation d'ateliers participatifs, le partage des récoltes et le temps consacré à l'entraide et au renforcement des liens. C'est le développement d'un capital social qui se construit sur la confiance.
Le retour : Le tissu social local se consolide. La confiance mutuelle, le partage de savoir-faire (capital Expérientiel) et la transmission de récits (capital Culturel) créent un véritable filet de sécurité. En cas de difficultés, votre projet peut compter sur un réseau humain de soutien, bien plus solide qu'une assurance classique.
ROI Économique (Capital Financier)
L'investissement : L'utilisation des revenus financiers non pas pour une accumulation stérile, mais pour réinjecter des fonds dans la boucle de régénération. Cet argent sert à financer l'achat de matériaux durables, de semences paysannes ou l'amélioration des infrastructures pour le "capital Vivant."
Le retour : Une résilience économique et une diminution des coûts de production. En diversifiant vos activités (vente directe, ateliers, services de design), vous réduisez votre vulnérabilité aux aléas du marché. En diminuant votre dépendance aux intrants externes (engrais, pesticides), vous minimisez vos dépenses récurrentes. L'argent devient un simple outil qui maximise l'abondance de l'écosystème, et non l'inverse.
ROI Spirituel & Expérientiel (Capital Spirituel)
L'investissement : Le temps passé à observer, à apprendre par l'action, et à cultiver votre propre connexion au vivant. C'est un engagement personnel profond.
Le retour : Un sens profond et un sentiment d'alignement. Le travail n'est plus une simple contrainte économique, mais une contribution significative à la régénération de la Terre. Cette démarche apporte une richesse intérieure, une paix d'esprit et le développement de compétences de vie essentielles qui n'ont pas de prix.
En conclusion, la preuve de ce modèle est simple : chaque investissement dans un capital (Vivant, Social, Culturel, etc.) génère des retours qui renforcent l'ensemble du système. C'est une logique radicalement différente qui nous invite à changer de prisme : la véritable richesse ne se compte pas, elle se cultive.
Le Collectif IDEC, au cœur de cette approche, accompagne les organisations, éco-lieux et territoires dans leurs transitions écologiques et sociales en intégrant des outils comme la Permacomptabilité et l'écocréativité pour des solutions concrètes et régénératives.
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