Charles Judes, Septembre 2024

Introduction
Dans les grandes traditions mythologiques, l’image du Déluge est un thème récurrent qui symbolise non seulement une purification de l’humanité mais aussi une épreuve initiatique pour les survivants. Ces récits véhiculent une sagesse ancestrale, mise en lumière à travers des figures héroïques comme Uta-Napishtim, un personnage central de l’Épopée de Gilgamesh.
Cette épopée sumérienne, l’un des plus anciens textes littéraires connus de l’histoire, raconte les aventures du roi Gilgamesh, mais c’est surtout le récit du Déluge, au cœur de ce récit, qui suscite des réflexions profondes sur l’équilibre entre l’homme et la nature, la sagesse divine et la prévoyance humaine.
L'histoire de Uta-Napishtim, ce roi sage sauvé par les dieux, trouve des résonances étonnantes avec les préoccupations contemporaines liées à la durabilité, à l’équilibre écologique et à la résilience des sociétés humaines face aux catastrophes.

La Mythologie du Déluge
Le Récit d'Uta-Napishtim : Une Construction pour la Survie
Le Déluge, dans l’Épopée de Gilgamesh, représente une punition divine à l’égard d’une humanité jugée corrompue par les dieux. Le dieu Enlil, irrité par l’humanité bruyante et chaotique, décide d’envoyer une pluie dévastatrice qui engloutira le monde. Cependant, le dieu Éa, fidèle à sa nature protectrice, choisit de sauver un homme juste : Uta-Napishtim, un roi dont la vertu et la sagesse sont reconnues. En lui révélant la catastrophe imminente, Éa lui donne des instructions détaillées pour la construction d’un « bateau » qui devrait le protéger des eaux dévastatrices.
La spécification la plus étonnante de ces instructions concerne la forme du bateau : au lieu d’un navire traditionnel, Éa prescrit à Uta-Napishtim de construire une structure cubique. Cette forme géométrique n’est pas anodine ; elle symbolise un équilibre parfait, une stabilité maximale qui doit résister à l’imminence du cataclysme. L’espace clos créé par ce cube est conçu pour résister à la violence des eaux, tout en offrant un abri aux diverses formes de vie que le roi doit préserver. L’ordonnance d’Éa repose sur la notion d’harmonie et de proportion parfaite, où chaque côté du cube est équivalent et équilibré.
"Le bateau que tu dois fabriquer, sera une construction équilatérale, à longueur et largeur identiques."

Le texte de l’Épopée de Gilgamesh ne donne pas seulement les dimensions de la structure mais aussi les principes de sa division intérieure. Chaque compartiment est conçu pour une fonction précise, l’accueil des humains, des animaux, mais aussi des provisions et des outils nécessaires à la survie après la catastrophe.
Le bateau cubique d’Uta-Napishtim n'est donc pas simplement une construction matérielle mais un espace symbolique, le noyau d’une régénération future. Après le déluge, Uta-Napishtim sera en effet celui qui reconstruira le monde, en envoyant des oiseaux à la recherche de terre ferme, et en relâchant les animaux afin de repeupler la planète.
Ainsi, ce récit mythologique prend une dimension philosophique et spirituelle : la survie après une catastrophe n’est pas seulement une question de protection physique, mais aussi une question de sagesse dans la manière de préparer l’avenir. Uta-Napishtim devient un garant de l’harmonie entre l’homme et la nature, entre le spirituel et le terrestre.
Le Cube de Uta-Napishtim
Le cube que construit Uta-Napishtim, véritable œuvre de prévoyance divine, est un artefact géométrique et symbolique de première importance. Sa forme géométrique est une métaphore de l'équilibre parfait, représentant à la fois l’ordre cosmique et la protection contre le chaos naturel.
Le fait que la structure soit subdivisée en plusieurs compartiments, chacun destiné à un rôle particulier (humains, animaux, nourriture), fait écho à l’idée d'un monde harmonieux où chaque aspect de la vie trouve sa place et sa fonction dans un tout interconnecté. Cette image du cube fait ainsi référence à un principe fondamental de la civilisation sumérienne : l’harmonie dans la diversité.

Les dimensions précises du bateau cubique d’Uta-Napishtim, bien qu’elles soient partiellement conjecturées par les historiens et les archéologues, sont considérées comme ayant un symbole fort de perfection géométrique.
Dans un contexte antique, l'idée même de réaliser une structure cubique, dans un monde où les dimensions étaient généralement irrégulières, apparaît comme un acte de défiance face au chaos des forces naturelles. Ce cube est donc non seulement un moyen de survie, mais aussi un acte symbolique, une manière pour Uta-Napishtim de s’impliquer activement dans la préservation de l’ordre divin sur Terre.
Le cube que bâtit Uta-Napishtim n’est pas seulement un refuge physique, mais aussi un symbole profond de résilience et de sagesse face à la catastrophe. Sa forme cubique, parfaitement équilibrée, incarne la stabilité et la sécurité au cœur même du chaos. Cette géométrie sert de métaphore d'un équilibre essentiel entre l’ordre et le chaos, entre le préservé et le détruit.
Les caractéristiques du cube sont frappantes :
Dimensions équilibrées : Une forme symétrique et proportionnée qui symbolise l’équilibre.
Compartiments multiples : Chaque espace au sein du cube est dédié à une fonction vitale pour la survie.
Le cube d’Uta-Napishtim, en tant qu’abri pour la vie et la régénération, est une vision de résilience et d’équilibre en période de crise.
Le Cube Harmonique de la Permacomptabilité : Une Vision Moderne de l'Équilibre
Le Cube Harmonique de la Permacomptabilité : Une Vision Moderne de l'Équilibre
La permacomptabilité, en tant qu’approche qui fusionne la permaculture et la comptabilité, est un concept qui s’inspire directement des leçons intemporelles du passé, comme celles illustrées par le cube d’Uta-Napishtim. Dans cette optique, le cube harmonique devient un outil symbolique pour illustrer comment les sociétés modernes peuvent organiser leurs activités pour assurer une durabilité à long terme tout en maintenant un équilibre entre plusieurs dimensions fondamentales : écologique, économique, sociale, culturelle et spirituelle.
Le cube harmonique représente une vision intégrée où chaque compartiment n'est pas isolé mais interconnecté avec les autres. Dans ce cadre, chaque aspect du développement humain, que ce soit l’écologie, l’économie, la culture, ou le bien-être social, doit être équilibré afin de créer un système résilient et adaptable. À l’instar du cube d’Uta-Napishtim, l’objectif est de garantir la protection et la pérennité face aux crises — qu’elles soient environnementales, sociales ou économiques.
Les principes de cette approche sont les suivants : le respect des cycles naturels, la prise en compte des ressources limitées, et la création de mécanismes d’adaptation et de régénération qui permettent aux systèmes de se maintenir et d'évoluer face aux perturbations. Le cube harmonique est donc à la fois un modèle théorique et pratique pour concevoir des systèmes qui répondent aux défis contemporains tout en honorant les principes d'équilibre écologique et social.

Comparaison entre le Cube d'Uta-Napishtim et le Cube Harmonique
Structure Équilibrée
Le cube d’Uta-Napishtim et le cube harmonique de la permacomptabilité partagent une structure fondée sur l'équilibre et la proportionnalité. La conception géométrique du cube comme étant un espace où chaque côté est égal illustre non seulement la stabilité mais aussi la vision de sociétés où chaque composant, qu’il soit humain ou naturel, joue un rôle égal dans le grand ensemble. Tout comme le cube d’Uta-Napishtim était conçu pour protéger toutes les formes de vie, le cube harmonique cherche à protéger l'ensemble de l’écosystème global, en intégrant tous ses aspects dans une harmonie durable.
Résilience et Adaptabilité
Un autre parallèle important réside dans la résilience et l’adaptabilité de ces deux cubes. Uta-Napishtim, en construisant un bateau cubique, cherche à répondre à l’urgence de la crise. Le cube harmonique, en revanche, propose une approche systémique permettant de maintenir l'équilibre face à des crises futures prévisibles et imprévisibles. Le cube d’Uta-Napishtim est une réponse à une crise immédiate, tandis que le cube harmonique représente un modèle préventif qui s’adapte aux défis futurs, qu'ils concernent les changements climatiques, les inégalités sociales, ou l'épuisement des ressources naturelles.
Une Vision Philosophiquement Durable
Les deux cubes, bien qu’ils soient issus de contextes très différents — l’un mythologique et l’autre contemporain — partagent une vision philosophique profonde et intemporelle : la nécessité d’une organisation résiliente et durable sur le long terme.
Ils sont tous deux des symboles de prévoyance, non seulement dans leur capacité à répondre aux crises, mais aussi dans leur potentiel à préparer un avenir prospère. Uta-Napishtim, en sauvant les espèces animales et humaines, ne pense pas uniquement à sa propre survie, mais à la régénération du monde, tout comme le cube harmonique cherche à anticiper l’avenir en équilibrant les besoins actuels et ceux des générations futures.
Conclusion : Le Cube, un Symbole de Résilience et d'Harmonie

En conclusion, En somme, l’analogie entre le cube d’Uta-Napishtim et le cube harmonique de la permacomptabilité met en lumière des principes fondamentaux qui restent valables aujourd'hui : l’équilibre, la résilience et la prévoyance sont au cœur de toute vision durable.
Que ce soit dans un mythe ancien ou dans une approche moderne de la gestion écologique et sociale, les concepts de stabilité et de régénération demeurent des axes de réflexion essentiels pour assurer un avenir harmonieux et viable. La fusion de la sagesse ancestrale et des outils contemporains ouvre la voie à une civilisation capable de répondre aux défis du présent tout en honorant les principes d’équilibre naturel.
Pour aller plus loin :
L’Épopée de Gilgamesh (Trad. André Guichard, 2001)
"The Epic Tale of Gilgamesh" par N.K. Sandars (Penguin Classics, 1972)
"Permaculture: A Designers' Manual" par Bill Mollison (Tagari Publications, 1988)
"The Permaculture Handbook" par Peter Bane (New Society Publishers, 2012)
"Geometry and Algebra in Ancient Civilizations", Journal of Ancient Civilizations, 2004 disponible ici.
Pour Platon le solide le plus stable est l'hexaèdre (cube), il représente la Terre https://fr.wikipedia.org/wiki/Cube,
Carrés magiques : https://fr.wikipedia.org/wiki/Carr%C3%A9_magique_%28math%C3%A9matiques%29
Comments